Temps de lecture: 5 mins

Otite chez le chat : causes, diagnostic et traitement

L'otite chez le chat doit être considérée comme un problème multifactoriel qui nécessite une approche spécifique, différente de celle adoptée chez le chien.

Introduction

Par définition, le terme « otite » désigne l'inflammation de l'oreille et/ou du pavillon auriculaire. Ce que l'on appelle « otite » chez le chat, sans plus de précisions, désigne généralement l'otite externe, affection qui touche le canal auditif externe et/ou le pavillon auriculaire sans impliquer le tympan, alors que lorsqu'il s'agit d'une otite moyenne ou interne, la localisation est généralement spécifiée1, 2.

Rapport: Obésité et surpoids chez les chats - Comment combattre la maladie

Comparée à la prévalence de l'otite chez le chien, l'otite chez le chat est une maladie rare3, ce qui explique peut-être le peu d'études menées à ce sujet, en particulier sur de vastes échantillons de population. Les quelques études portant sur l'évaluation de la prévalence de l'otite chez le chat ont révélé des résultats très variables, avec des valeurs oscillant entre 2 et 19 % chez les chats domestiques4. Une étude conduite en Italie sur des chats errants a en revanche mis en évidence des chiffres tout autres, la prévalence de l'otite externe étant estimée à 55 % dans cette population5, tandis qu'il est ressorti d'une autre étude conduite en Belgique sur des chats errants que la grande majorité des animaux testés avaient des oreilles saines2.

Caractéristiques cliniques et causes de l'otite chez le chat

La plupart des propriétaires qui consultent un vétérinaire car ils suspectent une otite chez leur chat rapportent que l'animal secoue la tête, se gratte et manifeste une douleur d'intensité variable lorsqu'on lui touche les oreilles. Ils signalent également une production excessive de cérumen et/ou de mauvaises odeurs.

L'examen clinique permet généralement de mettre en évidence des excoriations, un érythème, des croûtes et un œdème du canal auditif et/ou du pavillon auriculaire. Il est également possible qu'un othématome se soit formé à la suite d'un grattage excessif4.

Une bonne prise en charge de l'otite chez le chat suppose l'identification de la cause primaire, c'est-à-dire du facteur unique à l'origine de l'inflammation de l'oreille, de même que la recherche d'éventuels facteurs de prédisposition (qui augmentent le risque d'apparition de l'otite, sans pour autant la causer directement) et de facteurs d'entretien (qui ne causent pas l'inflammation initiale, mais sont responsables de certains signes cliniques et compliquent dès lors la guérison) de l'otite4.

Principales causes de l'otite chez le chat

Les principales causes de l'otite chez le chat sont les parasites (Otodectes cynotis, Demodex cati), les champignons (dermatophytes, Aspergillus spp, Sporothrix schenckii et Cryptococcus neoformans), les maladies allergiques (atopie, allergie alimentaire), les troubles de la cornification (otite séreuse idiopathique, dermatite faciale idiopathique spécifique du Persan et de l'Himalayen, hypothyroïdie primaire, maladies des glandes sébacées) et les maladies auto-immunes (otite externe nécrosante et proliférative, pemphigus foliacé)4.

Le parasite O. Cynotis est particulièrement pertinent ; il représente à lui seul 53 à 69 % des otites félines. Ce parasite touche davantage les jeunes animaux et se manifeste généralement par un prurit bilatéral et par la présence d'un exsudat de cérumen brun foncé ressemblant à du café moulu. Il peut coexister avec des infections secondaires à Malassezia spp, et dans près de 23 % des cas, il est possible d'isoler O. cynotis à l'extérieur du canal auditif1, 4.

Facteurs prédisposants de l'otite chez le chat

Parmi les facteurs qui prédisposent au développement de l'otite, on retrouve principalement le nettoyage superflu des oreilles et l'obstruction du canal auditif, qui peut être due à la présence de polypes auriculaires, à une néoplasie, à des cholestéatomes et à des granulomes à cholestérine, ou encore à une cystomatose des glandes cérumineuses4.  

Facteurs d'entretien de l'otite externe féline

Parmi les facteurs d'entretien de l'otite externe chez le chat, on retrouve les infections bactériennes ou à Malassezia spp, les réactions de contact, la présence de bouchons de cérumen ou de corps étrangers, et l'otite moyenne4. Dans une étude menée en Belgique, Malassezia spp était le micro-organisme le plus couramment détecté dans l'oreille externe de 130 chats errants2.

otite chat 

Diagnostic

L'évaluation diagnostique de l'otite chez le chat doit inclure une étude des antécédents médicaux, un examen clinique, un examen otoscopique, et une cytologie de l'exsudat. En outre, selon les facteurs de prédisposition ou d'entretien observés chez l'animal, certaines analyses complémentaires, mises en culture, biopsies, radiographies ou tomodensitométries peuvent être indiquées1, 4.

On ne manquera pas de rappeler quels paramètres sont considérés comme normaux dans l'oreille du chat.

Chez les chats, on considère que la présence d'une certaine quantité de cérumen (généralement brun foncé, bien que jaunâtre ou blanchâtre parfois) à l'intérieur de l'oreille est normale. Par conséquent, en l'absence de signes cliniques, cette observation ne doit pas évoquer une otite.

La présence de 2 à 3 Malassezia spp est considérée comme normale, de même qu'un maximum de 4 Cryptococcus neoformans par champ à un grossissement de 400 x.

De même, il est normal de trouver des kératinocytes, des kératinocytes nucléés et des agrégats de mélanine.

Paramètres anormaux dans l'oreille du chat

La présence de bacilles est en général le signe d'une pathologie et la détection de cellules inflammatoires est également considérée comme anormale2, 4.

Traitement

Quelle que soit la cause de l'otite, le nettoyage de l'oreille est essentiel pour le traitement de l'otite chez le chat.R Un nettoyage approprié permettra d'éliminer les exsudats présents dans l'oreille et de mener un examen plus approfondi du conduit auditif. Selon le caractère du chat, il est possible qu'il soit nécessaire de recourir à une sédation profonde ou à une anesthésie générale. Rappelons toutefois que le nettoyage excessif de l'oreille est également un facteur de prédisposition de l'otite. D'où l'importance de préciser aux propriétaires que les oreilles doivent être nettoyées uniquement si nécessaire, tout en leur montrant comment le faire correctement. Certains auteurs recommandent d'utiliser un sérum physiologique stérile pour éviter les réactions de contact, tandis que d'autres privilégient l'usage de produits pour chats aux propriétés cérumenolytiques1, 4.

Le traitement spécifique de l'otite doit chercher à éliminer la cause primaire et à contrôler les facteurs de prédisposition et d'entretien identifiés pour chaque cas.

  • Pour le traitement de l'otoacariase, divers acaricides sont disponibles sur le marché, soit pour une application à l'intérieur de l'oreille (ivermectine ou milbémycine) soit pour un usage topique, bien que l'action soit systémique (sélamectine, imidaclopride/moxidectine, et plus récemment les isoxazolines)4.
  • Un traitement antibiotique/antifongique est indiqué en présence de bactéries ou de levures détectées par cytologie. Certains auteurs recommandent d'éviter les produits à usage topique en raison du risque de réactions de contact, et auront tendance à privilégier les traitements systémiques même en l'absence d'otite moyenne1. D'autres, cependant, considèrent qu'il est très difficile de traiter efficacement une otite externe sans utiliser de traitement topique, et recommanderont de recourir à un traitement systémique en présence d'une otite moyenne uniquement4.
    • La plupart des produits antifongiques/antibactériens à usage topique contiennent également un glucocorticoïde, ce qui s'avère bénéfique pour le contrôle du processus inflammatoire. Cette même logique a amené certains auteurs à vérifier l'hypothèse selon laquelle la mométasone, un agent à usage topique, aurait de puissants effets anti-inflammatoires sans pour autant exercer d'effets systémiques4.
  • Chez les chats atteints d'une otite nécrosante et proliférative, le traitement repose sur l'administration topique de tacrolimus ou de glucocorticoïdes à usage topique ou systémique. Il a également été rapporté que la cyclosporine pourrait être efficace3-4
  • Enfin, le traitement chirurgical serait indiqué en cas d'otite secondaire à des masses néoplasiques ou à des polypes, et en cas d'otite moyenne pharmacorésistante.

Conclusions

Comme pour bien d'autres maladies, il existe des différences importantes dans l'étiologie de l'otite, et donc dans sa prise en charge, entre les chats et les chiens. Bien que, dans de nombreux cas, l'otite externe soit provoquée par des acariens chez le chat, il convient de faire un examen otoscopique approprié suivi d'un examen microscopique de l'exsudat otique, tel quel et avec une coloration Diff-Quick. En cas d'absence de réponse au traitement ou de rechute, il est préférable d'étudier les potentiels facteurs de prédisposition et d'entretien de l'otite au lieu d'envisager une autre option thérapeutique4, 6.

New call-to-action

Bibliographie
1. Kennis RA. (2013). Feline otitis: diagnosis and treatment. Vet Clin North Am Small Anim Pract; 43: 51-56.
2. Bollez A, de Rooster H, Furcas A, et al. (2018). Prevalence of external ear disorders in Belgian stray cats. J Feline Med Surg; 20: 149-154.
3. Mauldin EA, Ness TA, Goldschmidt MH. (2007). Proliferative and necrotizing otitis externa in four cats. Vet Dermatol; 18: 370-377.
4. Brame B, Cain C. (2021). Chronic otitis in cats: Clinical management of primary, predisposing and perpetuating factors. J Feline Med Surg; 23: 433-446.
5. Perego R, Proverbio D, Bagnagatti De Giorgi G, et al. (2014). Prevalence of otitis externa in stray cats in northern Italy. J Feline Med Surg; 16: 483-490.
6. Swales N, Foster A, Barnard N. (2018). Retrospective study of the presentation, diagnosis and management of 16 cats with otitis media not due to nasopharyngeal polyp. J Feline Med Surg; 20:1082-1086.